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De la prochaine présidentielle : pourquoi et comment la famille Compaoré ne retiendra que l'un des siens !

   Il est évident qu'aujourd'hui tous les débats, pratiques et manifestations politiques dans notre pays, se rapportent essentiellement à la prochaine présidentielle dont l'enjeu déterminant pour l'avenir de notre système de démocratisation est de réussir ou pas une alternance politique qui rime avec la chute Démocratique du pouvoir Compaoré au profit d'un pouvoir nouveau, porteur d'un programme véritablement alternatif. Si du côté de l'opposition il n'y a encore aucune stratégie connue, du côté du pouvoir patrimonial, les choses se sont nettement précisées ces derniers temps et par voie de la presse internationale : américaine pour le Président Compaoré; française( Jeune Afrique) pour son frère cadet François Compaoré. Ces deux principaux tenants réels du pouvoir s'y disent non exclus et même probables candidats à la prochaine présidentielle. François précise même qu'il pourrait bien être le " candidat de la continuité" au cas où son grand frère Blaise " pas trop vieux" et pratiquement " irremplaçable ", renoncerait à briguer un autre mandat. Après presque trois décennies de pouvoir durant lesquelles elle a joui de tant d'honneurs et de privilèges, accumulé tant de richesses, pourquoi cette famille y tient-elle encore?

    Je ne considère pas outre mesure l'hypothèse gonflée et sciemment répandue et selon laquelle ce serait une volonté des puissances occidentales de maintenir Blaise coûte que coûte au pouvoir. Aujourd´hui, mieux qu'hier, pour la défense pérenne de leurs intérêts, ces puissances pour de multiples raisons nationales et internationales tiennent mieux à l'ancrage des systèmes démocratiques( nécessaires pendants de leur système économique) qu'à la protection résolue de pouvoirs autocratiques friands de tripatouillages constitutionnels. Il y a eu bien sûr quelques exceptions liées au régime Sarkozy! Mais il faut néanmoins savoir que ces puissances finissent toujours par s'aligner derrière ceux qui ont le rapport des forces politiques favorables. C'est donc principalement de la mobilisation nationale contre le détournement en cours de l'esprit et de la lettre de notre Constitution consensuelle de 1991, que dépendra la position desdites puissances. Je crois du reste que si notre pays est retenu dans un système de lutte contre le terrorisme, le doute(pour ne pas dire plus) est bien installé dans ces milieux quant à l'efficacité future du leadership de Blaise Compaoré.

   Pour en revenir aux raisons domestiques de cette tentative de pérennisation au pouvoir, j'en retiendrai  les trois plus importantes qui sont trois peurs : peur des poursuites judiciaires hors du pouvoir; peur de la perte éventuelle d'énormes richesses accumulées dans des conditions peu licites dans l'ensemble; peur de la perte de trop nombreux avantages multiformes et multisectoriels acquis par de collaborateurs-bénéficiaires nationaux et étrangers.

     En effet, il suffit d'abord de rappeler que les dossiers Sankara, Norbert Zongo ( pour ne citer que ceux là) sont entrain d'être  réouverts au plan international; des poursuites judiciaires pourraient être engagées pour les implications réelles ou supposées du régime Compaoré dans les horreurs des guerres civiles au Libéria, en Sierra Leone, en Angola, en Côté d'Ivoire etc. Regardons aussi comment la famille Compaoré a très vite accumulé d'immenses richesses qu'elle craint de perdre au cas où le peuple exigerait légitimement et légalement d'un pouvoir alternatif, le bilan de gestion de ce régime patrimonial au nom d'une nouvelle gouvernance de lutte pour la justice et donc contre les biens mal acquis. Pour rappel cette famille régnante s'approprie des richesses dans tous les domaines rentables : banques,assurances,BTP, hydrocarbures, mines, hôtellerie, agro-business, cuirs et peaux, cycles(moteurs), poissonnerie, eau minérale, coiffure, hôpitaux privés, pause- cafés et réceptions VIP, entreprise de presse nationales et internationales etc. Enfin, ils sont très nombreux les bénéficiaires de ce système : tantôt prête-noms, tantôt sous traitants, tantôt opérateurs économiques,tantôt porte voix, tantôt ministres, ambassadeurs, hauts fonctionnaires, directeurs généraux... Tout ce beau monde à aussi souvent accumulé des fortunes sans autre justification que celle de leur proximité avec des membres de la famille Compaoré ! Pour la famille et ses proches donc, toute alternance politique pourrait signifier la fin de l'impunité. Il y a donc urgence de s'accrocher!

      Et comme la famille Compaoré n'a confiance qu'en ses propres membres( confère le nombre élevé de collaborateurs de Blaise remerciés sans ménagement après de loyaux services), elle a choisi la voie aventuriste de la pérennisation au pouvoir selon deux plans : un plan A maintiendrait Blaise Compaoré au pouvoir et un plan B qui y hisserait son cadet François : 

          S'agissant du plan A, la famille veut effectivement se servir d´un Sénat pour modifier l'article 37 en sa faveur. Mais ce plan à été découvert à sa grande surprise et il est fortement décrié, dénoncé et rejeté    par la majorité du peuple. Et cela, Blaise Compaoré le sait : pas à travers les rapports de son CDP mais de ceux de ses nombreux services de renseignements,étatiques ou non. Mesurant à présent les risques à maintenir ce plan A, il n'est pas exclu que la famille le modifie en ayant recours à une Assemblée Constituante qui remodelerait  la constitution( peut être même une autre constitution) pour permettre au Président Blaise de continuer à son poste. C'est peut-être pour ce faire que Blaise a inspiré un " Front Républicain " qui est maintenant en pleine structuration. De ce Front pourrait bien sortir un " Gouvernement d'Union nationale" et une " Assemblée Constituante". En tout cas les parties prenantes à ce Front viennent de déposer sur le bureau du Président du " Groupe parlementaire CDP" leurs différentes propositions. Le plan B annoncé par François Compaoré lui-même, n'est pour le moment qu'un plan de secours au cas où des événements imprévus viendraient contrecarrer le plan A.

     Il appartient alors à tous les démocrates de tous les camps, de toutes les idéologies, de tous les sexes, de tous les âges...de conjuguer leurs intelligences et leurs luttes pour conjurer et vaincre cette dérive dynastique et antidémocratique. Il y va de la liberté, de l'équité, de la justice, du progrès et de la paix pour tous! Ç´est et ça sera difficile. Mais restons convaincus que les fruits de la victoire seront à la hauteur de la détermination et des sacrifices consentis dans la lutte qui est véritablement une lutte historique d'émancipation nationale.

 

      Étienne Traoré Université de Ouagadougou. Blog : nababio.blog4ever.com



10/11/2013
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